
Les essais nucléaires en Polynésie française
Comment la France a-t-elle reconnu ses responsabilités dans les essais nucléaires en Polynésie française ?
Les essais nucléaires sont des « expérimentions » permettant aux ingénieurs militaires de mettre au point des armes nucléaires. Dès 1960, la France prépare différents modèles de bombes : bombes à gravitation puis lâchées depuis un avion. Par la suite, les modèles sont miniaturisés pour permettre aux bombes de tenir dans la « coiffe » des missiles disposés dans des fusées, des sous-marins, des avions et également des chars d’assaut. Les essais d’engins nucléaires peuvent se dérouler en atmosphère ou en sous-terrain.
Les essais aériens :
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les essais sur barge
Les bombes sont positionnées face aux postes d’enregistrement avancés (PEA), sur une barge ancrée dans le lagon. Ces barges sont totalement détruites après chaque expérimentation obligeant alors la mise en place continuelle de nouvelles structures. L’explosion de la bombe à 3 mètres de hauteur entraîne dans le champignon une partie de l’eau, des coraux ainsi que des sédiments du lagon provoquant alors des contaminations lors des retombées. Quatre essais ont été réalisés de cette manière entre 1966 et 1967 dont le premier le 2 juillet 1966: Rigel.
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les largages à partir d'avions
En 1966, 1973 et 1974, trois essais largués à partir d’avions en vol ont été réalisés à des distances respectives de 85, 26 et 17 kilomètres de Moruroa. Ces essais sont ceux qui se rapprochés le plus des conditions réelles d’utilisation des armes nucléaires.
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les essais sous ballons captifs
Les essais à partir des barges étant trop polluants, un nouveau moyen pour réduire l'impact des essais aériens a été recherché. Les essais sous ballons captifs ont alors été mis en place. En effet, lors d’un tir effectué sur le sol ou à partir d'une barge, la boule de feu créée par l'explosion (pouvant atteindre jusqu'à 500 mètres de rayon pour les engins les plus puissants) se heurte aux matériaux présents et à l'eau du lagon. Ces derniers sont alors vaporisés et mélangés aux gaz chauds.
Les ballons captifs, eux, consistent à faire exploser l'engin à une hauteur supérieure au rayon de la boule de feu afin d’éviter l'interaction avec le sol ou avec l'eau, limitant alors les retombées radioactives. La bombe est accrochée sous un ballon gonflé à l’hélium. Ce dernier est placé à une hauteur de quelques centaines face aux postes d’enregistrement avancés. En réalité, ces tirs sont également très contaminants. Après chaque tir, quelques semaines de travail ont été laissées aux décontamineurs pour nettoyer la zone avant de préparer le tir suivant.
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les essais de sécurité
Très peu d'informations sont disponibles sur ces essais. Ils sont dits de sécurité car ils sont réalisés pour s'assurer que les armes nucléaires ne s'amorcent pas d'elles-mêmes lors de stockage ou de transport. On vérifie donc que les charges sont "autosûres" et qu’il n’y a aucun risque d’explosion accidentelle, en particulier lors d’embarcations à bord d’avions. Pour cela, une bombe est lâchée depuis le sommet d’une tour haute de quelques mètres, permettant de constater la dispersion du plutonium en surface lors du choc avec le sol. En principe, ces essais ne provoquent pas de déclenchement de réaction en chaîne. Cinq expériences de ce type ont été faites sur le motu « Colette », à l’ouest de Denise. Ces essais ont provoqué une très importante contamination au plutonium, il a alors fallu nettoyer cette zone pendant des années. Cependant très peu d’informations sont disponibles sur ce type d’essais.
Les essais souterrains
Les tirs souterrains ne doivent pas dépasser la puissance maximum de 150 kilotonnes pour être en règle avec les traités internationaux mais aucune puissance exacte des tirs n’a été donnée par le ministère de défense. Cependant, il a été observé par mesures sismiques que le tir Hyrtacos (effectué sous lagon de Fangataufa en 1990) a été le plus fort avec une puissance de 118 kilotonnes.
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Tirs sous couronne corallienne
En 1975 ont été réalisés les deux premiers tirs souterrains sur la côte sud de Fangataufa. Les tirs souterrains ayant eu lieu après et jusqu’en 1986, ils se sont déroulés sous la couronne de Moruroa (sauf en 1989 pour un tir dit « de sécurité »). Le nombre total de tirs effectués sous la couronne corallienne de Mororua est de 83 et de 2 pour Fangataufa. Ces deux zones présentent aujourd’hui un risque d’effondrement pour cause de fissures. Des forages de 400 à 1200 mètres de profondeur ont été prélevés dans la couche basaltique du sous-sol volcanique des atolls avant de faire exploser des bombes. Généralement, les tirs n’ont jamais été effectués deux fois de suite dans la même zone.
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Tirs sous lagon
Les tirs sous lagon fonctionnent selon le même principe que les essais sous couronne. Les premiers ont débuté en 1981 à Moruroa mais les tirs les plus puissants ont été effectués sous le lagon de Fangataufa à partir de 1988. Au final, on compte 54 tirs sous lagon à Moruroa et 8 tirs sous lagon à Fangataufa.
Au total, il y a eu 181 essais en Polynésie française de 1966 à 1996, 41 aériens et 140 souterrains. Le dernier essai a eu lieu le 27 janvier 1996.

Photo du tir Regel le 2 juillet 1966
source: mururoa.org
Emission France 2 du 28 janvier 1996: 6ème et dernier essais français
source: ina